Annulation de la décision d’homologation de la DIRECCTE validant la suppression de 88 emplois de Conforama France.
Le Comité central d’entreprise de Conforama France ainsi que la Fédération CGT des personnels du commerce Distribution Services demandaient l’annulation de la décision par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation du travail et de l’emploi (DIRECCTE) d’Ile-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l’emploi de la société Conforama France. Ce plan prévoyait la suppression de 88 emplois dans le cadre d’une restructuration du service après-vente de l’entreprise.
Le Tribunal a d’abord jugé que le Comité central d’entreprise n’apportait aucun élément de nature à établir l’insuffisance des mesures sociales prévues dans le document de l’employeur mais a fait droit à l’argumentation du syndicat CGT.
Ce syndicat soutenait, en effet, que les critères permettant de définir, dans le cadre d’un licenciement collectif pour motif économique, l’ordre de désignation des salariés devant être licenciés, ne pouvaient s’appliquer dans le cadre des seuls établissements dans lesquels les emplois étaient supprimés.
L’article L. 1233-5 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques dite « Loi Macron », prévoit que lorsque le plan de sauvegarde de l’emploi est arrêté par l’employeur sous la forme d’un document unilatéral, le périmètre d’application des critères d’ordre ne peut être inférieur aux zones d’emploi, définies par l’INSEE, dans lesquelles se trouvent un ou plusieurs des établissements concernés par les suppressions d’emploi.
La question se pose de la conciliation de ce texte avec l’arrêt du Conseil d’Etat n° 398256 « FEDERATION DES TRAVAILLEURS DES INDUSTRIES DU LIVRE, DU PAPIER CARTON ET DE LA COMMUNICATION CGT et autres » du 10 juillet 2017, par lequel la Haute Assemblée a jugé qu’est applicable un accord collectif d’entreprise fixant un périmètre d’application des critères d’ordre à un niveau inférieur à celui de l’entreprise, même au cas de licenciements prévus par un plan de sauvegarde de l’emploi faisant l’objet d’un document unilatéral.
A la différence de la situation soumise au Tribunal administratif de Melun, la solution appliquée par le Conseil d’Etat concernait un document unilatéral homologué avant l’intervention de la loi du 6 août 2015.
Plus précisément, la société Conforama France se prévalait d’un accord collectif datant de 1989 pour soutenir qu’il lui permettait de déroger à la règle posée à l’article L. 1233-5 du code du travail.
Le Tribunal a écarté cette argumentation au motif que compte tenu de sa date d’adoption, cet accord collectif ne pouvait être regardé comme ayant eu pour objet d’autoriser l’employeur à déroger aux dispositions de cet article dans sa rédaction issue de la loi du 6 aout 2015. Il en a déduit qu’en se contentant de constater que, du fait de la suppression de l’ensemble des emplois des établissements concernés par le plan de sauvegarde de l’emploi, la définition des critères d’ordre de licenciement était inutile, sans s’assurer du respect de ces dispositions du code du travail, le DIRECCTE avait méconnu l’étendue du contrôle qu’il lui appartenait de faire et commis une erreur de droit. Il a par conséquent annulé la décision d’homologation litigieuse.